Vous avez déjà entendu dire que "l'Homme descend du singe"...
Mais alors duquel ? Un chimpanzé ? Un gorille ?
STOP ! Cette phrase est un raccourci tout à fait faux : ce n'est pas du tout comme ça que les espèces ont évolué !
Retournons voir ce qu'explique un certain Charles Darwin sur ce qui fait que vous êtes là, aujourd'hui, sous forme humaine.
Qu'a dit Charles Darwin ?
Le 24 novembre 1859 paraît un ouvrage scientifique révolutionnaire : "L'origine des espèces" signé Charles Darwin.
Une révolution... car jusqu'à ce moment, tout le monde s'en tenait à l'histoire biblique : toutes les formes de vie avaient été créées en même temps, dans des apparences différentes, plantes, microbes, animaux (à pattes, à nageoires, à plumes, à poils, petits, grands,... ) comme une sorte de "catalogue" de tout ce qui pouvait être à la fois vivant et original.
Dans son texte The origin of species by means of natural selection (l'origine des espèces au moyen de la sélection naturelle), le biologiste anglais démontre que non, tout ce petit monde là ne sort pas d'une création "en même temps" ; ils sont tous issus d'un ancêtre commun qui a donné naissance (au fil de très nombreuses années) à des "variantes".
Preuve à l'appui, il explique que chaque espèce vivante que l'on peut voir - du chêne au requin en passant par un microbe - s'est faite à partir d'autres espèces (qui n'existent bien souvent plus)... et qu'elle continue d'évoluer.
Bien sûr, toutes les possibilités de modification d'une espèce ne sont pas des réussites... ce qui explique que seules les plus armées pour survivre dans leur environnement ont survécu, au moins quelques générations.
Sa théorie est visionnaire ! Le "changement progressif" des êtres vivants est exactement ce que confirment aujourd'hui les études de l'ADN des différentes espèces, existantes ou disparues.
Notez que le terme "évolution" n'est pas de lui, même si on cite parfois ses idées en disant "théorie de l'évolution de Darwin"...
Ce terme n'apparaîtra que plus tard... et il est assez traître : ce n'est pas un changement qui se fait au niveau d'un individu mais au fil de nombreuses générations de l'espèce à laquelle ses descendants appartiennent !
Cinq espèces d'hominidés, dont l'Homme !
Illustrons ce que dit "l'évolution des espèces" en prenant une espèce particulière... nous, les humains !
Pour étudier les espèces vivantes ou disparues, on observe depuis longtemps les différences et ressemblances entre les individus de ces espèces. On voit ainsi très vite qu'un cheval n'a par exemple pas l'air tout à fait proche de l'être humain. Mais cela peut être très trompeur !
Heureusement, nous avons depuis quelques dizaines d'années un outil bien plus fiable : l'analyse de l'ADN, c'est-à-dire l'analyse précise des gènes, ces molécules qui nous "programment", dans notre apparence et notre fonctionnement physique,.. Et il vaut mieux se fier à ces analyses qu'à notre vue : un cochon a 90% de gènes identiques à ceux des humains !
Car toute l'évolution des espèces est une question de génétique. Et la génétique nous confirme chaque jour la théorie de l'évolution : les mutations génétiques produisent par hasard des "mutants" plus ou moins adaptés à un environnement changeant. Les moins chanceux sont fragilisés et leurs descendants se raréfient ; les mieux lotis survivent et se multiplient... tant que les conditions extérieures leur sont favorables. Mais la génétique permet de "retracer" comment des espèces peuvent être liées entre elles et à quelle période une espèce aujourd'hui disparue a donné naissance à deux "variantes".
On sait ainsi maintenant que nous appartenons à la famille des hominidés, qui comprend cinq espèces vivantes à ce jour :
- les orang-outangs
- les gorilles
- les bonobos
- les chimpanzés
- l'Homo sapiens (nous).
Dire que nous appartenons à la même famille (la famille des hominidés) signifie que nous provenons tous d'une espèce commune - le fameux "ancêtre commun" - dans laquelle certains individus ont subi des mutations génétiques.
Ainsi, il y a environ 8 millions d'années, cette espèce commune a donné naissance à deux lignées :
- la lignée Ponginae (dont les représentants actuels sont les orang-outangs)
- la lignée Homininae, les homininés.
Dans cette deuxième lignée des homininés, il y a eu ensuite deux nouvelles variantes, et donc deux branches dans la lignée :
- la lignée Gorilla (dont les représentants actuels sont les gorilles)
- la lignée Homo, les hominiens.
A nouveau, dans la lignée Homo, deux variantes sont apparues il y a 6 millions d'années :
- les panines qui donneront à leur tour deux variantes : Pan paniscus (bonobos) et Pan troglodytes (chimpanzés)
- les hominines qui donneront différentes espèces : plusieurs ont disparues au fil du temps ; nous, Homo Sapiens, sommes les derniers représentants vivants.
Qu'est-ce qu'une nouvelle espèce ?
A chaque fois qu'apparaissent deux variantes d'une espèce, celà signifie qu'une différence se crée dans le capital génétique de certains individus et qu'ils la propagent ensuite dans leurs descendances. Il se crée en fait un nouveau "capital génétique original".
C'est le cas à l'embranchement ο Panines / Hominines et à l'embranchement ο Bonobo / Chimpanzés. Mais les variations sont minimes : ainsi, par exemple, hommes et chimpanzés, malgré "une ou deux mutations génétiques d'écart", ont 99,5% de gènes communs !
Pourquoi certains "mutants" se reproduisent et créent une nouvelle espèce ?
Quand apparaît un nouveau "capital génétique original", il ne peut devenir une nouvelle espèce que si les premiers mutants sont bien armés pour survivre dans leur environnement. Et il y a pour comprendre cela un exemple très parlant : les phalènes !
A l'origine, ces papillons sont blancs. Une couleur bien pratique pour ne pas servir de repas aux oiseaux quand on habite des forêts de bouleaux aux troncs très pâles !
Puis arrivent quelques mutants, noirs. Cet inconvénient d'être alors bien visible sur des troncs blancs conduirait cette nouvelle espèce à disparaître vite fait : au mieux peuvent-ils espérer "durer" une ou deux générations puisqu'ils sont les premiers à être repérés par les oiseaux... et donc mangés.
Sauf que... si en même temps, les troncs de bouleaux deviennent sombres, le scénario s'inverse : les phalènes noirs sont avantagés par rapport aux phalènes blancs et c'est l'espèce blanche qui a du mal à survivre et à se reproduire.
C'est ce qui est arrivé lors de la révolution industrielle car la combustion du charbon noircissait les arbres !
Avec cette "histoire", il est simple de retenir que "l'évolution des phalènes" n'est pas que cette espèce de papillons s'est "transformée" par le changement de couleur des papillons déjà nés... mais que c'est leurs descendants noirs qui ont été moins mangés et ont ainsi pu produire à leur tour de nouvelles générations de papillons noirs. Cette espèce nouvelle a "pris le dessus" sur les papillons blancs parce qu'elle était plus apte à survivre sur des troncs désormais noircis !
Pour autant, noir ou blanc, aucun papillon n'était plus fragile ou malade qu'un autre : c'est l'environnement qui rendait les papillons blancs plus visibles aux prédateurs et réduisait leur durée de vie et leurs chances de se reproduire ! Et c'est l'environnement qui a favorisé l'évolution de l'espèce "phalènes" vers des phalènes majoritairement noirs. Vous saisissez la subtilité ?
Cela est vrai pour d'autres caractéristiques qu'une apparence : tous les individus d'une même espèce sont différents les uns des autres, parce que leur capital génétique, leur ADN, ne sont pas extement les mêmes.
Ainsi, une partie de ces individus peut-être favorisée par l'environnement... parce qu'ils se mettent à digérer une plante très répandue autour d'eux par exemple. Ces "mutants" mieux adaptés à leur environnement vivent alors plus facilement, réussissent mieux à se reproduire, ont plus de descendants... et transmettent leur "particularité" aux générations suivantes. Tandis qu'un groupe qui n'a pas "muté" peut se retrouver moins adapté à l'environnement et décliner... C'est ainsi que les espèces évoluent et s'adaptent en permanence à leur environnement.
Retour à l'expression "sélection naturelle" de Darwin
Darwin a nommé « sélection naturelle » cette sélection des individus les mieux adaptés. Pour être le plus précis possible sans entrer trop dans les détails génétiques, on peut dire que la sélection naturelle désigne le fait que les traits qui favorisent la survie et la reproduction voient leur fréquence s'accroître d'une génération à l'autre. Cela repose sur trois principes :
- le principe de variation : les individus diffèrent génétiquement les uns des autres,
- le principe d'adaptation : les individus les plus adaptés au milieu survivent et se reproduisent davantage,
- le principe d'hérédité : les caractéristiques avantageuses doivent être héréditaires.
La sélection naturelle concerne donc la propagation de variations génétiques héréditaires - quand elles rendent un être vivant plus adapté à son milieu - au fil des générations. Cela donne l'impression, vu de l'extérieur et au cours du temps, qu'une espèce a évolué... mais en fait c'est qu'au moment où on regarde cette espèce en la comparant à l'espèce telle qu'elle existait avant, ses individus n'ont plus tout à fait les mêmes gènes que leurs ancêtres et ont tous hérité de cette variation avantageuse.
On récapitule... et on réalise que chacun est un "merveilleux hasard" !
Graĉe aux études des gènes, on sait que, chaque jour, des mutations génétiques produisent par hasard des "mutants" plus ou moins adaptés à un environnement changeant. Le seul responsable des modifications progressives des animaux et des plantes - ce qu'on appelle "évolution" - est donc... le hasard !
Mais, nous, Humains, avons un défaut : nous sommes pleins de préjugés et nous aimons trouver une raison "logique" à tout.
Or c'est impossible quand on réfléchit aux modifications progressives des formes de vie qui nous entourent : il n'y a pas de logique puisque c'est le hasard qui fait que des gènes se "copient mal" dans les cellules vivantes... et cela arrive tout le temps, chez tous les êtres vivants.
Ca se sont des faits, scientifiques, une réalité mille et mille fois observée et confirmée.
Bigre ! Voilà qui n'arrange pas ceux qui voudraient qu'une "Force Supérieure" guide l'évolution du monde avec un but précis ! Comment ça, l'Homme est apparu par hasard ?? Et bien, oui !!
Et que l'Homme soit apparu par hasard n'est pas une opinion, ou une croyance ou je ne sais quoi de subjectif : c'est un fait, prouvé par la façon dont se copient les gènes, parfois avec des erreurs...
Mais, dans tous les esprits - et le mien aussi ! - des phrases banales comme "L'Homme descend du singe" et "Seul le plus fort survit" tordent chaque jour le message de Darwin ! Il est assez difficile de résister à cette mauvaise interprétation car elle est d'autant plus tentante qu'elle a bien servi une vision du monde très centrée sur l'être humain et ce qu'il a envie de croire...
Les créationnistes (qui soutiennent que "si,si, tous les êtres vivants ont été créé en 7 jours") et les personnes convaincues que "la Nature sait ce qu'elle fait" ont le même défaut : ils nient la réalité.
Donc :
non, nous ne descendons pas des singes : ils sont nos cousins.
Et non, vous n'êtes pas en vie par "force" ou par "talent" : vous faites partie d'une lignée génétique qui a subi - par hasard ! - les mutations les plus favorables à l'environnement qu'il a fallu traverser pour arriver, tel que vous êtes, jusqu'à aujourd'hui. Un merveilleux hasard !
Pour une piqûre de rappel sur ce que signifie la théorie de l'évolution, sur ce qu'elle veut dire VRAIMENT, courez voir la comédie scientifique "Tout le monde descend", écrite par Marie-Charlotte Morin - dont le sérieux et l'humour lui ont déjà valu de gagner le concours "ma thèse en 180 secondes" en 2015.
Votre vision de la Terre, de ses habitants animaux et végétaux... et de ce que produit l'environnement sur toute forme de vie s'en trouvera éclairé !
Plus d'info sur la tournée (tout public à partir de 12 ans) : www.toutlemondedescend.com
Tout le monde descend - extraits
Marie-Charlotte Morin (texte original, adaptation théâtrale, illustrations graphiques et jeu)
Alexandre Taesch (adpatation théâtrale, mise en scène et jeu)